Test The Last of Us Part 1 : du neuf avec du vieux

Le 2 septembre 2022 sortait The Last of Us : Part 1, dont le titre fait écho au second volet de la série Naughty Dog, Part 2. Fort de graphismes rehaussés, d’une IA plus performante, et d’autres améliorations, le titre justifiait ainsi son appellation de « remake »… et donc, la somme de 80€ qui va avec. Qu’en est-il vraiment ? Le voyage de Joël et Ellie vaut-il le coup d’être vécu sous cette nouvelle monture ? Spoiler alert : oui, mais pas à n’importe quel prix non plus…

Des personnages plus vrais que jamais

C’est sans doute ce qui marque le plus lorsque l’on commence ce Part 1 : les visages, animations, et interprétations sont sûrement au top de ce que le jeu vidéo AAA est capable de produire actuellement. L’amélioration avec la version originale est clairement notable, ce qui demeure important pour un jeu ayant l’ambition de se rapprocher du cinéma. Plusieurs scènes gagnent ainsi en intensité, même si les enjeux et le dénouement sont déjà connus.

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L’un des moments forts du titre, plus que jamais percutant ©Naughty Dog, Sony

Je n’avais par exemple pas ressenti aussi intensément le trouble de Joël à l’approche de l’hôpital de Salt Lake City. Ellie est également plus convaincante que jamais, notamment lors de ses multiples altercations, et sa confrontation avec David. Cela vaut bien évidemment aussi pour les décors sublimant la direction artistique, qui était déjà l’un des principaux points forts du jeu original. On notera aussi des miroirs et vitres réfléchissants, manquement qui faisait parfois tâche sur le remaster PS4.

Des panoramas saisissants ©Naughty Dog, Sony

Introduction choc, tutoriel mollasson ?

Si l’amélioration de l’aspect visuel est notable, tout n’a cependant pas été dépoussiéré. Passée son introduction iconique, le jeu original s’essoufflait durant une bonne heure. C’est malheureusement aussi le cas pour Part 1, qui a laissé tel quel le déroulement du jeu.

Certes, cette heure sert de tutoriel ainsi qu’à contextualiser la vie de Joël dans la zone de quarantaine de Boston. Il n’en demeure pas moins que cette séquence post-introduction reste peu trépidante. L’histoire des armes de Robert sert assez grossièrement de catalyseur à la rencontre avec Ellie.

En termes de gameplay, ces séquences d’infiltration et/ou gunfight au milieu des docks s’avèrent assez longues. Finalement, j’ai plus que jamais eu l’impression que The Last of Us (qu’il s’agisse de l’opus de 2013 ou de Part 1) ne commençait vraiment qu’une fois Ellie rencontrée. Ce qui a au moins le mérite de renforcer l’aura du personnage… Cependant, raccourcir cette heure post-introduction n’aurait pas été de trop. Peut-être, toutefois, que cette remarque ne vaut pas pour les personnes découvrant le jeu pour la première fois.

Le rédacteur de l’article lors du niveau des docks ©Naughty Dog, Sony

Un remake, mais pas trop quand même

Afin de justifier le terme « remake », Naughty Dog a notamment évoqué l’amélioration de l’IA. Celle-ci est en effet notable, tant pour les ennemis que pour les personnages alliés. S’il m’est déjà arrivé de voir Ellie ou Tess courir à proximité d’un claqueur sans que celui-ci n’en semble très perturbé, les couacs restent bien moins courants que dans le jeu original. Ellie notamment, parvient plus régulièrement à se faufiler parmi les ennemis sans être (trop) dans leur champ de vision supposé. Les ennemis, quant à eux, ont davantage tendance à nous contourner, rendant leur comportement plus crédible.

C’est toutefois davantage le level-design étriqué qui pose problème plutôt que l’IA des alliés et ennemis à part entière. Conscient de ce problème, The Last of Us : Part 2 a considérablement élargi les niveaux en offrant plusieurs chemins différents à une même destination. Il y est ainsi possible de se faufiler à travers les ennemis d’un grand nombre de façons différentes, diversifiant les approches d’infiltration et rendant le jeu plus dynamique.

Dans Part 2, les approches d’infiltration sont par ailleurs agrémentées d’autres améliorations de gameplay (silencieux, possibilité de ramper dans les hautes herbes…), ou de nouvelles situations (apparition de chiens, rencontre entre ennemis humains et infectés…). Naughty Dog n’a malheureusement pas cherché à intégrer ces éléments de Part 2 dans cette nouvelle version.

Le niveau de l’hôtel, rempli de couloirs quasi-identiques apparaît aujourd’hui particulièrement vieillot et peu inspiré en termes de level-design. Pour un objet promu en qualité de remake et commercialisé en conséquence, on aurait pu s’attendre à ce que cette zone soit au moins un peu remise au goût du jour.

Enfin, difficile de ne pas évoquer les mini-énigmes à base de planches, échelles et autres bennes à ordure. Ces dernières (servant sans doute lors de la version de 2013 de temps de chargement cachés) apparaissent aujourd’hui presque plus datées que les premiers poils de barbe si bien modélisés de Joël. Il est cependant possible de voir ces séquences rébarbatives comme la source d’une motivation supplémentaire qu’aurait eu Joël afin d’apprendre à Ellie à nager dans l’optique du second volet…

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©Naughty Dog, Sony

Où commence le remake ?

Si la décision de ne pas s’écarter de The Last of Us 2013 peut se justifier par la volonté de faire vivre fidèlement l’expérience originale (mais sans doute surtout pour des raisons de rentabilité…), elle reste décevante par rapport à cette promesse de remake. Le joueur n’est ainsi jamais réellement surpris par rapport à la version précédente, contrairement à un Resident Evil 4 Remake qui, quant à lui, jouait intelligemment sur le questionnement des joueurs au sujet des changements opérés.

Certes, les deux projets jouent sur des registres très différents. The Last of Us a l’ambition de proposer une expérience proche du cinéma, tandis que Resident Evil 4 assume pleinement son statut de jeu vidéo fun. Mais il apparaît difficile de cataloguer Resident Evil 4 Remake et The Last of Us Part 1 tous deux comme des remakes quand le premier constitue par rapport à l’original un nouveau jeu à part entière, tandis que le second ne s’en détache jamais vraiment en-dehors de ses améliorations évoquées plus haut. On peut par conséquent s’interroger sur la réelle définition du terme « remake ». Au-delà du fait que le code source diffère de l’édition précédente, qu’en est-il de la perception par le joueur ?

J’ai tenté de ne pas tuer le médecin. ©Naughty Dog, Sony

Conclusion : la meilleure façon de découvrir The Last of Us 1

Cet article s’est longuement concentré sur les éléments qui ont été pour moi sources de déception. Il n’en demeure pas moins que The Last of Us Part 1 reste la meilleure façon de découvrir le premier titre de la saga. Entre sa direction artistique fascinante où la nature a repris ses droits, son écriture convaincante (notamment par le biais des journaux laissés par les survivants), et son ambiance prenante, l’aventure de Joël et Ellie reste toujours incontournable.

Note :

Résumé : Le prix de lancement de 80€ apparaît excessif pour un titre qui ne repense pas l'expérience originale de 2013 en profondeur. Le level-design reste figé, et l'absence d'intégration des mécaniques de Part 2 peut être vue comme une occasion manquée. Si vous n'avez jamais joué à The Last of Us, cette dernière monture offre toutefois la version la plus aboutie, au prix fort des jeux AAA. Pour les autres, cette fidélité presque absolue à la version de 2013, conjuguée à un prix de lancement élevé, rend l'investissement plus difficilement justifiable. Personne ne vous jugera si vous vous laissez tenter, mais je recommanderais d'attendre une promotion pour acheter à un prix plus juste.

Martin Karpinski

Trop trouillard pour jouer aux survival-horrors jusqu'à mes 18 ans. En 2008, Dead Space fut ma première porte d'entrée vers cet univers. J'ai depuis rattrapé mon retard, tant au niveau des classiques (Resident Evil, Silent Hill...) que des jeux indépendants. Si il me reste encore des lacunes, j'ai cependant créé ce site pour partager ma passion du survival-horror et certaines de mes réflexions. J'écris également pour le webzine Journal du Japon.

2 réponses

  1. Mike Eul dit :

    Je n’avais pas fait l’original et j’ai apprécié la découverte du remake. Il faut aimer les jeux « couloir », c’est son plus gros défaut à mes yeux. Des mécaniques de jeux anciennes mas on s’y fait, cela ne m’a pas perturbé. Sinon l’aventure était sympa. Graphiquement très plaisant. On se plait à découvrir les différentes zones et décors. Bref, globalement sympa pour celui qui ne l’a pas joué en original. Je précise que je suis un vieux joueur…

    • Martin Karpinski dit :

      Mieux vaut un jeu de couloir maîtrisé qu’un jeu plus ouvert mais qui ne sait pas où il va cela dit ! Mais je peux comprendre que ça puisse être perçu comme un défaut. Le 2 (que j’estime beaucoup) expérimente une zone ouverte pendant une séquence d’une bonne heure environ, et c’est plutôt intéressant. La première fois que Naughty Dog propose une zone ouverte il me semble.

      En tout cas, c’est une bonne chose que vous l’ayez découvert via le remake, car il a le mérite de corriger certains éléments de l’original qui étaient un peu maladroits. D’ailleurs, je l’ajouterai peut-être dans l’article, mais le comportement des stalkers (les monstres qui se cachent et se déplacent à quatre pattes que l’on voit notamment dans les égouts quand Joël est avec Sam) est également très différent de l’original et plus conforme à ce que les développeurs voulaient faire (mais n’y étaient alors pas parvenu).

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