Test Project Zero 4 : Le masque de l’éclipse lunaire

4ème volet d’une série née en 2001, ce Project Zero : Le masque de l’éclipse lunaire (2008) n’était jamais sorti de l’archipel japonais. C’est aujourd’hui chose faite avec ce remaster disponible sur l’ensemble des consoles next-gens. 15 ans après la réalisation du jeu original, le genre du survival-horror a bien évolué. Project Zero 4 parvient t-il encore à susciter le frisson après tout ce temps ?

Test réalisé sur PS4 à partir d’une version fournie par Koei Tecmo Europe.

Trailer du jeu Project Zero 4 : Le masque de l’éclipse lunaire

Rapide précision : il s’agit du premier jeu de la série Project Zero auquel je joue. Ne vous étonnez donc pas si l’article ne comporte pas de comparaisons ou de références aux autres épisodes.

Souvenirs disparus et enquête horrifique

Ce Project Zero 4 a la particularité de proposer quatre personnages jouables au cours de ses 12 chapitres. Parmi ceux-ci nous retrouvons trois jeunes femmes (Ruka, Madoka, et Misaki) revenant sur l’île de Rogetsu. Elles y avaient en effet été enlevées étant enfants au cours d’un étrange festival. Deux autres filles enlevées en même temps qu’elles ont récemment trouvé la mort dans d’étranges circonstances. Les trois survivantes n’ont que des souvenirs flous de leur enlèvement. Elles reviennent alors sur l’île afin d’éclaircir leur passé et comprendre le sort de leurs deux amies.

Le quatrième personnage répondant au nom de Choshiro est quant à lui un détective privé. Chargé de l’enquête à la suite de l’enlèvement, il avait fini par retrouver les cinq filles disparues. Choshiro poursuit un dénommé Yo, qu’il suspecte d’être à l’origine de l’enlèvement.

L’histoire de ce masque de l’éclipse lunaire est particulièrement dense. Elle s’éclaircit surtout lors des derniers chapitres (ici appelés « phases »). Il peut être fastidieux de faire toute la chronologie des événements du jeu. La faute surtout à ces histoires qui s’entre-mêlent (le joueur change de personnage à chaque nouvelle phase). Cependant, le mystère qui entoure l’étrange festival évoqué plus haut et tout ce que celui-ci implique parvient à capter l’attention. On souhaite vite en savoir plus sur les étranges coutumes et croyances de cette île, ainsi que sur la maladie qui frappe ses habitants.

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L’entrée du manoir où se déroulent la majorité des événements du jeu

Un jeu d’ambiance avant tout

Project Zero : Le masque de l’éclipse lunaire est un jeu qui vaut surtout pour son ambiance. On est rapidement conquis par ce manoir lugubre qui cache bien des mystères à lever. L’atmosphère est en effet convaincante à plus d’un titre. On pense notamment la bande-son et ses morceaux souvent dérangeants. Les thèmes de la chambre d’Ayako, mais surtout celui de la chambre secrète d’à côté procurent un certain malaise. Le jeu gagne clairement à être joué au casque pour profiter au mieux de cette atmosphère sonore particulièrement soignée. L’esthétique de certaines salles capte l’attention et vient compenser les couloirs peut-être trop répétitifs et uniformes.

Le charmant morceau utilisé lorsque l’on explore la chambre ci-dessous.
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Une des chambres les plus inquiétantes (et donc réussies) du jeu

Le titre n’est évidemment pas avare en effets horrifiques. On y retrouve bien entendu un classique du genre, les jumpscares. Ceux-ci restent cependant suffisamment espacés et bien mis en scène pour ne pas devenir risibles. Les cinématiques du jeu renvoient directement à l’esthétique de cinéma d’horreur japonais. C’est notamment le cas pour les enregistrements vidéo et leur inquiétante étrangeté qui inspirent la cassette maudite du célèbre film Ring.

Le level-design participe aussi à cette ambiance réussie. On prend plaisir à ouvrir des raccourcis ou découvrir de nouvelles zones, et lever peu à peu les mystères de ce manoir, à l’image d’un Resident Evil de la vieille école.

Des déplacements qui font froid dans le dos

Cependant, les fantômes hantant l’île de Rogetsu ne sont pas seuls à être effrayants. La rigidité des déplacements de ce Project Zero 4 l’est tout autant ! Cela peut se pardonner lorsque l’on affronte les ectoplasmes dans une zone espacée. Le tout est beaucoup plus délicat quand le combat a lieu dans des endroits étriqués. Et malheureusement, c’est parfois le cas.

On éprouve alors des difficultés à bien se positionner pour photographier ces chers spectres sans (trop) se mettre en danger. D’autant plus que ces derniers ont, comme tout fantôme digne de ce nom, la capacité de passer à travers les murs. Tout cela procure des combats certes stressants, mais aussi frustrants, voire agaçants.

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Inutile de se retourner.

Bien entendu, on comprend la démarche d’imposer des déplacements lents et rigides. Transformer Project Zero en FPS ultra-dynamique aurait annihilé la sensation de peur que l’on doit ressentir lors de ces combats. La cause de cette frustration incombe sans doute davantage à l’existence de ces espaces trop exigus évoqués plus haut. Et cela est d’autant plus problématique lorsque plusieurs fantômes nous assaillent en même temps ! On pourra cependant noter la présence d’une commande pour faire un demi-tour rapide, ici particulièrement appréciable (et incontournable !). La lenteur de ces déplacements est aussi parfois frustrante lors des phases d’exploration.

Lente, lente horreur

Project Zero 4 assume de façon générale une certaine lenteur. C’est le cas pour la mobilité des personnages évoquée plus haut. Même avec plusieurs fantômes aux trousses, nos protagonistes ont bien du mal à faire preuve d’une condition physique et d’un instinct de survie dignes de ce nom. Malgré leur pointe de vitesse pour le moins limitée, on pourra d’ailleurs les entendre s’essouffler passé un certain temps. De quoi laisser songeur quand à la qualité des cours d’éducation physique sur l’archipel nippon.

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La condition physique des personnages ne leur permet visiblement pas non plus de déplacer les fauteuils roulants bloquant les accès au couloir…

La lenteur assumée du titre se voit aussi sur d’autres aspects. L’ouverture des portes, par exemple, se fait toujours avec une animation maintenant quelques secondes de mystère et de tension quant à ce qui nous attend derrière. Même le ramassage des objets a droit à une animation dédiée. Avec potentiellement une mauvaise surprise qui vous obligera à rester concentré durant la séquence.

Cette volonté de maintenir le joueur dans une certaine lenteur pour provoquer une horreur diffuse est louable. Elle fait d’ailleurs bien son effet lors des premières heures. Ces mécaniques perdent cependant de leur charme à la longue (le jeu durant environ 13-14 heures), surtout lorsque l’on connaît déjà le contenu des salles dont on ouvre la porte (même si à certains moments on pourra avoir droit à de nouvelles surprises).

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Le ramassage d’un objet prend de longues secondes et vous demandera de rester concentré pour éviter une mauvaise surprise (un succès est aussi à la clé !)

Cette lenteur paraît parfois cocasse et en contradiction avec l’ambiance horrifique du titre. C’est par exemple le cas lorsqu’un personnage prend tout son temps pour ouvrir tranquillement une porte alors qu’un terrifiant fantôme le poursuit. A l’image de Sebastian Castellanos (dans The Evil Within premier du nom), essoufflé après avoir couru plus de quelques secondes, il y a aussi une certaine dissonance ludo-narrative (lien vers une définition et une réflexion intéressante à ce sujet) à voir le personnage de Choshiro, censé être détective privé et ancien policier, incapable de courir convenablement. Peut-être un sort de ces satanés fantômes ?

L’appareil photo au cœur du gameplay

L’appareil photo (appelé « Camera Obscura ») comme seule arme constitue la grande particularité de la série Project Zero. Malgré l’effet arcade un peu daté, cette originalité reste toujours plaisante. On pourra cependant regretter une certaine répétitivité qui peut devenir lassante. « Courir » (avec des guillemets), repérer le fantôme grâce au signal de localisation, et photographier : tel est le chemin qu’il faudra utiliser pour sortir victorieux de chaque combat. Certains ectoplasmes ont toutefois leurs particularités en termes de déplacement. Il est aussi possible d’apporter des améliorations et fonctionnalités à l’appareil à l’aide de pierres à ramasser. Cela a le mérite de changer légèrement la façon d’aborder la rencontre avec les fantômes. Le personnage de Choshiro dispose quant à lui d’une lampe spirituelle au fonctionnement un peu différent.

L’appareil photo va toutefois au-delà de l’aspect affrontement. Il est aussi utilisé pour photographier des esprits inoffensifs (mais n’en demeurant pas moins souvent effrayants), apparaissant tout au long de l’aventure. Ces esprits disparaissent parfois vite, nécessitant de prendre rapidement la photo. Celle-ci prise, vous ne gagnerez pas seulement une place de plus à votre Pokédex de fantômes, mais aussi des points échangeables contre des soins ou des films plus puissants pour votre appareil. D’où l’intérêt de rester attentif ! Le joueur pourra aussi photographier des poupées Hozuki cachées un peu partout (parfois subtilement).

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Un fantôme pris en photo

Ces mécaniques n’ont évidemment rien de révolutionnaires. Elles apportent cependant un aspect collectionnite sympathique dans un registre horrifique.

Conclusion sur Project Zero 4

Ce remaster de Project Zero 4 n’est pas un remake, et n’a d’ailleurs pas été vendu comme tel. Il ne corrige donc pas les défauts du jeu original, qui apparaissent d’autant plus évidents 15 ans plus tard. Parmi ceux-ci, la rigidité abusive des déplacements (déjà anachronique en 2008 à l’image de Resident Evil 5, sorti l’année suivante) conciliée à des espaces trop réduits est sans doute le plus pénalisant. Cela fait que le prix de vente actuel du jeu (49,99€) m’apparaît un peu trop élevé pour un portage remastérisé. A moins bien sûr d’être un grand amateur du genre ou de la licence. D’autres me répondront toutefois que ces prix sont devenus monnaie courante dans l’industrie vidéoludique.

Cependant, le titre de Koei a aussi des qualités à faire valoir. L’ambiance et la direction artistique sont clairement les gros points forts du jeu. Si vous aimez le cinéma d’horreur japonais et les ambiances horrifiques à base de spectres, vous devriez donc passer outre ses défauts pour apprécier ce masque de l’éclipse lunaire et découvrir les mystères de l’île de Rogetsu.

Note :

Martin Karpinski

Trop trouillard pour jouer aux survival-horrors jusqu'à mes 18 ans. En 2008, Dead Space fut ma première porte d'entrée vers cet univers. J'ai depuis rattrapé mon retard, tant au niveau des classiques (Resident Evil, Silent Hill...) que des jeux indépendants. Si il me reste encore des lacunes, j'ai cependant créé ce site pour partager ma passion du survival-horror et certaines de mes réflexions. J'écris également pour le webzine Journal du Japon.

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