L’inventaire dans le survival-horror

L’inventaire constitue un élément incontournable du jeu vidéo. Dans le domaine de l’horreur, il y est particulièrement important. Permettant de concevoir des accessoires ou d’observer les objets récoltés (pouvant servir de base aux énigmes), l’inventaire revêt parfois une fonction plus poussée, allant jusqu’à influer sur le scénario ou les mécaniques de gameplay. Petit tour d’horizon des inventaires marquants dans le survival-horror.

Inventaire et cohérence avec l’univers

En 2008, Dead Space aura marqué le jeu vidéo horrifique de par sa réalisation de haute-volée et son ambiance réussie. Le HUD (affichage d’informations sur la santé ou les munitions à l’écran) directement intégré à l’équipement du personnage d’Isaac Clarke aura été une idée brillante afin de mieux mettre en valeur les environnements de l’USG Ishimura, vaisseau dans lequel se déroulent les événements du jeu.

L’inventaire apparaît quant à lui sous la forme d’un hologramme. Lors de son affichage, il a ainsi la particularité de ne pas mettre le jeu en pause. Cela maintient la pression, le joueur était toujours à la merci d’un monstre nécromorphe. Surtout, cet hologramme est raccord avec l’ambiance futuriste du titre de Electronic Arts. Dead Space concilie donc parfaitement bien l’aspect pratique de l’inventaire avec la cohérence de son univers.

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Aperçu de l’inventaire de Dead Space s’affichant sous forme d’hologramme ©Electronic Arts

6 ans plus tard, Alien Isolation utilisera une idée similaire en utilisant un inventaire empreint de rétrofuturisme. Ce dernier consiste à imaginer comment les interfaces du futur étaient imaginées dans le passé. Alien Isolation se déroule en effet en 2137. Cependant, les différents objets et interfaces du jeu font davantage penser à comment ce futur était imaginé dans les années 70. L’inventaire faussement moderne (jusqu’au bruitage lorsqu’un accessoire est fabriqué) est donc aussi tout à fait cohérent avec l’univers du titre.

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Alien Isolation ©Sega, The Creative Assembly, 20th Century Fox

The Last of Us : le crafting intégré dans l’action

En 2013, The Last of Us fut l’un des premiers jeux horrifiques à mettre en scène ses personnages durant la conception de leurs accessoires (armes, soins…). On voit ainsi Joel ou Ellie s’accroupir, ouvrir leur sac, et bricoler jusqu’à la conception de l’objet souhaité. On pourra rester dubitatif sur leur capacité à créer un cocktail molotov, bombe artisanale, ou kit médical en quelques secondes. Toutefois, cette concession reste plus immersive que de créer l’objet par magie via deux boutons sur l’inventaire. Cela ajoute aussi une certaine tension lors des affrontements. Humains et infectés pourront en effet toujours vous agresser pendant la confection.

Un kit de soin réalisé en 3 secondes chrono ©Naughty Dog, Sony

L’impact d’un inventaire restreint sur le gameplay

L’inventaire peut aussi impacter directement sur le gameplay. Resident Evil premier du nom, limitait par exemple le nombre d’objets que ses personnages pouvaient transporter. Chris Redfield ne pouvait ainsi prendre que 6 objets avec lui contre 8 pour Jill Valentine. Cela ajoute une difficulté supplémentaire pour le joueur. Ce dernier est en effet contraint de planifier ses déplacements et de ne prendre avec lui que le strict nécessaire afin de laisser le plus grand nombre d’emplacements disponibles pour ramasser de nouveaux objets. Le joueur peut choisir de stocker ceux qui ne lui semblent pas utiles dans l’immédiat à l’intérieur d’un coffre accessible comme par magie dans chacune des salles de sauvegarde.

Ce système n’est pas sans incohérence. Outre ce fameux coffre magique, il est aussi amusant de constater qu’une clé prend autant de place dans l’inventaire qu’un lance-roquettes… Il est aussi parfois aberrant de ne pas pouvoir utiliser directement un objet juste sous nos yeux. Resident Evil demande en effet à ce qu’un objet soit dans l’inventaire pour être utilisé. Si celui-ci est rempli et que vous voyez des munitions juste devant vous, il est donc inutile d’espérer pouvoir recharger votre arme.

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Cet inventaire limité contraint le joueur à prendre des décisions sur les objets à emporter avec lui ©CAPCOM

En-dehors de ce dernier élément agaçant, ces autres concessions restent acceptables pour ce qu’elles impliquent en termes de gameplay. Cela oblige en effet le joueur à prendre des décisions stratégiques sur ses déplacements, ainsi qu’à s’approprier l’environnement du labyrinthique Manoir Spencer. L’observation des éléments de l’inventaire est aussi encouragée. Celle-ci est en effet nécessaire pour résoudre certaines énigmes, et comprendre la fonction des objets-clés.

Resident Evil 4 : une mallette iconique

Connu pour avoir amorcé le virage action de la série CAPCOM, Resident Evil 4 n’est pas un titre qui se prend au sérieux. Le plaisir de jeu est en effet au cœur de l’expérience dirigée par Shinji MIKAMI. Preuve en est cette mallette qu’on ne verra jamais à l’écran permettant à Leon Scott Kennedy de transporter un arsenal plutôt conséquent. Resident Evil 4 ne s’embarrasse donc clairement pas de la cohérence. La contrainte se révèle bien moins forte que dans l’épisode originel.

Il est d’ailleurs également possible d’investir dans une mallette plus grande auprès du mystérieux marchand. Les plus maniaques apprécieront de passer du temps à organiser leur mallette de façon à ce que les accessoires soient placés de la façon la plus logique possible, par types par exemple (soins, armes, munitions…). Afin d’accueillir un nouvel élément ramassé, il sera parfois nécessaire de combiner certains objets ou de réagencer votre inventaire. Une sorte de mini-jeu dans le jeu, donc. A noter que le remake de 2023 a ajouté une touche de tri automatique. Celle-ci donne la possibilité de ranger la mallette de façon optimale en un seul bouton afin de laisser le plus d’espace disponible possible.

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Le rangement de la mallette de Leon, un mini-jeu dans le jeu ? ©CAPCOM

SIGNALIS, Darkwood : un hommage jusqu’à l’inventaire

Sorti en 2022, SIGNALIS est un hommage direct au survival-horror des années 90 et début 2000. Il puise donc son inspiration dans les deux grandes sagas de l’époque : Resident Evil et Silent Hill. L’influence de la série CAPCOM est surtout visible dans la gestion de l’inventaire, et ce qu’elle implique en termes de gameplay. La personnage d’Elster ne peut pas transporter plus de 6 éléments, comme Chris dans le Resident Evil originel. Il faudra donc là aussi réfléchir aux objets à emporter avec soi avant d’explorer les environnements. Certains seront en effet essentiels afin de résoudre une énigme et progresser.

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Un système d’inventaire à maîtriser ©rose-engine, Humble Bundle

Darkwood (2017) reprend aussi ce principe. Cet inventaire limité colle particulièrement bien avec la mécanique d’expédition au cœur du titre de Acid Wizard Studio. La nuit, le monde de Darkwood est envahi par des monstres ne vous laissant que très peu de chances de survie. Il est donc primordial de se mettre à l’abri avant que le soleil ne se couche. Le jour est quant à lui consacré à la collecte de ressources et à l’exploration. Explorer de jour avec un inventaire limité est donc encouragé afin de ramasser le maximum de ressources, qui pourront ensuite être stockées dans les différents abris du jeu.

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Un inventaire qui peut sembler complexe à gérer ©Acid Wizard Studio, Crunching Koalas

Silent Hill 2 : l’impact de l’inventaire sur l’histoire

Sorti en 2001, Silent Hill 2 constitue un titre phare du jeu d’horreur. Il est d’ailleurs encore considéré comme le meilleur survival-horror de nos jours, notamment pour sa profondeur psychologique et sa narration. Celle-ci a l’originalité d’introduire le comportement inconscient du joueur dans le déroulement du scénario.

L’inventaire fait parti des différents facteurs pouvant influencer le destin de James Sunderland. Si ce dernier regarde plus ou moins régulièrement la photo de sa femme décédée Mary présente dans l’inventaire, le joueur aura en effet davantage de chances d’obtenir la fin « Leave » ou « In Water ». A noter que l’inventaire comprend aussi une lettre écrite par Mary dont l’apparence évoluera mystérieusement au cours de l’avancement du jeu… ce qui a bien entendu un véritable sens narratif.

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©KONAMI

De l’influence sur le gameplay à son apport à la cohérence du jeu, jusqu’à un impact potentiel sur le scénario, l’inventaire a donc une importance capitale dans le jeu vidéo. Le genre du survival-horror n’y fait bien entendu pas exception. Preuve en est ces différents exemples de titres ayant proposé une utilisation intelligente et marquante de l’inventaire. Ce dernier y dépasse en effet sa fonction pratique pour impacter réellement l’expérience de jeu. N’hésitez pas à suggérer d’autres survival-horror dont l’inventaire vous a marqué !

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Super Lone Survivor, un jeu de survie qui intègre l’alimentation au gameplay ©Superflat Games

Martin Karpinski

Trop trouillard pour jouer aux survival-horrors jusqu'à mes 18 ans. En 2008, Dead Space fut ma première porte d'entrée vers cet univers. J'ai depuis rattrapé mon retard, tant au niveau des classiques (Resident Evil, Silent Hill...) que des jeux indépendants. Si il me reste encore des lacunes, j'ai cependant créé ce site pour partager ma passion du survival-horror et certaines de mes réflexions. J'écris également pour le webzine Journal du Japon.

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